9 juillet 2025

Delphine Moulu : « Nous sommes le 3ème pays mondial en nombre de startups Femtech »

Delphine Moulu : « Nous sommes le 3ème pays mondial en nombre de startups Femtech »

Entre invisibilisation historique et dynamique entrepreneuriale émergente, la Femtech se positionne aujourd’hui comme un levier essentiel pour repenser la santé au féminin. Pour comprendre les principaux enjeux de ce domaine, nous avons échangé avec Delphine Moulu, cofondatrice et Directrice générale de Femtech France.

Delphine, pouvez-vous nous raconter votre parcours et ce qui vous a conduit à vous engager dans l’univers de la Femtech ?

J’ai suivi un cursus en école de commerce puis j’ai toujours travaillé dans des startups. Ma dernière expérience était à STATION F où j’occupais le poste de directrice événementielle et où j’ai co-créé le premier programme d'accompagnement de startups Femtech en France. Ce qui devait être un side project m’a complètement passionné et m’a décidé à quitter STATION F pour me lancer à 100 % dans ce domaine en créant l’association Femtech France.

Pourquoi avoir créé l’association Femtech France ? Quelle en est la genèse ?

J’ai cofondé Femtech France avec Juliette Mauro et Christel Bony en 2022 pour réunir l'écosystème (entrepreneurs, investisseurs, professionnels de santé, etc.). Nous voulions aider les entrepreneurs en leur donnant accès à ces acteurs et en leur permettant de se fédérer en réseau.

Quelles sont aujourd’hui les principales thématiques couvertes par les startups Femtech en France ?

La Femtech a commencé en se concentrant sur la santé reproductive et menstruelle. On observe aujourd'hui une évolution vers une approche plus globale, reconnaissant que la santé des femmes ne se limite pas à la sphère gynécologique, et qu’il y a en fait des spécificités féminines pour de nombreuses pathologies (maladies cardiovasculaires, santé mentale, etc.). Nous publions chaque année un baromètre du marché de la Femtech en France où nous présentons les thématiques les plus adressées par les startups, le secteur qui s’est le plus développé est celui de la ménopause où nous avons vu une hausse de 6 points du nombre de startups entre 2023 et 2024.

Quels freins principaux rencontrent les entrepreneuses et entrepreneurs Femtech en France aujourd’hui ?

Les entrepreneur·es de la Femtech en France font face à plusieurs freins. Il y a d’abord la recherche, les femmes ont été exclues des essais cliniques pendant de nombreuses années, on manque donc de données genrées en santé ce qui est indispensable pour des entrepreneur·es qui développent une innovation en santé des femmes. Le deuxième gros frein est celui de l’accès aux financements, il y a peu de subventions publiques dédiées aux startups Femtech et les investisseurs français risquent de passer à côté de très bons deals s’ils ne regardent pas de plus près ce marché.

Quels sont les leviers d’action concrets de Femtech France pour accompagner les startups du secteur ?

Nous menons trois actions principales :

  • Soutenir les entrepreneurs : notre collectif rassemble aujourd'hui plus de 80 startups françaises du secteur, que nous accompagnons dans le développement de leurs produits et de leur entreprise ;

  • Fédérer l'écosystème : nous créons des passerelles entre ces startups et les grands acteurs institutionnels et industriels, tels que les laboratoires pharmaceutiques, les assureurs ou encore les hôpitaux ;

  • Favoriser le financement : nous mobilisons activement des sources de financement pour aider ces startups à se développer et mettre leurs produits sur le marché.

Comment la France se situe-t-elle par rapport à d’autres pays en matière de Femtech ?

Nous sommes le 3ème pays mondial en nombre de startups Femtech, derrière les États-Unis et le Royaume-Uni. Pourtant en termes d’investissement la France chute à la 7ème place (alors que les États-Unis et le Royaume-Uni restent sur le podium), révélant l’écart entre l’écosystème entrepreneurial et les moyens financiers disponibles. C’est cela qui nous a poussé à co-créer, avec la Région Ile-de-France, le premier fonds d’investissement Femtech français, annoncé à Viva Tech en juin dernier.

Quels domaines de la santé féminine sont encore très peu couverts et où vous aimeriez voir émerger des solutions ?

Il y en a beaucoup. On voit peu d’innovations émerger sur la contraception par exemple. C’est aussi le cas des maladies cardiovasculaires (pourtant la première cause de mortalité chez les femmes), et des maladies neuro dégénératives (alors que les femmes âgées ont un risque 50 % plus important que les hommes de développer une démence, et plus particulièrement une maladie d'Alzheimer). Si l’on regarde une pathologie chronique comme l’endométriose, il y a certes de nombreuses startups en France qui se créent sur du diagnostic et du suivi des symptômes, mais très peu vont développer des traitements.

Quelles sont les prochaines actualités pour Femtech France ?

Nous allons lancer un nouveau bootcamp à la rentrée qui s'adressera cette année aux entrepreneur·es qui développent une innovation en santé mentale des femmes. La formation alternera immersion en secteur hospitalier et ateliers de travail et l'appel à candidatures est ouvert jusqu’au 14 juillet.